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En savoir +Les risques psychosociaux au sein du secteur des arts de la scène
Synthèse
Les informations présentées ci-dessous sont le fruit d’une enquête par questionnaire, coordonnée par le CeRSO et commanditée par l’APEF, qui s’est déroulée auprès des travailleur·euse·s du secteur des arts du spectacle au cours du printemps 2024. Au total, 281 réponses complètes ont été récoltées. Ce qui représente environ 2,5% de la population réelle selon l’ONSS (en prenant, comme population de référence, le nombre de travailleur·euse·s occupé·e·s durant le dernier trimestre de l’année 2021).
Pour celles·eux qui souhaiteraient aller plus loin que la synthèse présentée ci-dessous, le rapport global est disponible ici, dans un document au format pdf de 50 pages comprenant de nombreux graphiques statistiques : https://fonds304.be/wp-content/uploads/2024/12/Rapport-RPS-304-FINAL.pdf
- Sous-populations : Le groupe des intermittente·s (60 %), qui regroupe les intermittent·e·s, les intérimaires et les CDD, et le groupe des CDI (33 %) cohabitent au sein de l’échantillon. Chacun des groupes a ses caractéristiques propres et une réalité différente.
- Âge de l’échantillon : L’échantillon est plutôt jeune puisque 71 % des répondante·s ont entre 26 et 45 ans.
- Fonctions prédominantes : 69 % des CDI occupent une fonction administrative et 80 % des intermittente·s occupent une fonction artistique.
- Cumul des contrats : Le secteur est caractérisé par le cumul des contrats. 88 % des intermittent·e·s cumulent plusieurs contrats auprès de plusieurs employeurs. Les CDI ont moins tendance à cumuler les contrats mais 28 % connaissent tout de même cette réalité.
- Horaires variables et atypiques : Le secteur des arts du spectacle est également caractérisé par des conditions temporelles particulières. Seulement 3% des CDI et 1% des intermittente·s ne travaillent jamais pendant les horaires atypiques de travail. 60 % des intermittent·e·s ont des horaires qui fluctuent.
- Faible ancienneté chez l’employeur : 68 % des intermittente·s ont maximum 5 ans d’ancienneté auprès de leur employeur. 70 % des CDI ont maximum 10 ans d’ancienneté auprès du leur.
Afin d’évaluer les manifestations des risques psychosociaux au sein du secteur des arts du spectacle, nous avons questionné les répondant·e·s sur la fréquence d’une série de symptômes. Les 34 symptômes sont regroupés en 5 catégories : les symptômes physiques, émotionnels, cognitifs, comportementaux et spirituels. Voici les principales conclusions :
- En moyenne, les répondante·s signalent avoir ressenti 12,86 symptômes souvent ou tout le temps au cours du dernier mois.
- 65% des répondante·s ressentent du stress souvent ou tout le temps, 65% disent avoir une difficulté à se déconnecter du travail, 60% disent avoir le sentiment d’être submergé·e·s par la charge de travail et 59% ressentent de la culpabilité parce qu’il·elle·s ne réussissent pas à « tout faire ».
- La catégorie des symptômes cognitifs, tels que les difficultés à se concentrer ou le fait de se sentir submergé par le travail, est la catégorie la plus importante en termes de fréquence d’apparition.
- Il y a des différences entre l’expression des symptômes chez les CDI et leur expression chez les intermittente·s. En effet, on retrouve l’épuisement émotionnel parmi les symptômes principaux chez les intermittent·e·s et la fatigue profonde chez les CDI.
- En moyenne, les intermittent·e·s ont déclaré 13,16 symptômes et les CDI ont déclaré 11,99 symptômes.
- Au moment de remplir le questionnaire, 4 % des répondante·s étaient en temps partiel médical, 20 % ont été en incapacité de travail de longue durée et 7 % ont vécu un accident de travail au cours des 12 derniers mois.
- Le secteur est également marqué par une présence inquiétante du harcèlement. Le harcèlement moral semble être la première catégorie : 30 % des répondant·e·s déclarent (plutôt oui et tout à fait) avoir été victimes de harcèlement moral au travail. 24 % déclarent avoir subi des comportements racistes ou discriminatoires, 22 % des propos ou comportements à caractère sexuel, et 22 % avoir subi de la violence physique ou verbale. Les résultats mettent en avant une insatisfaction face aux mesures mises en place suite aux cas de harcèlement ainsi qu’une insatisfaction du soutien proposé par la ou les hiérarchies.
Dans cette enquête nous avons étudié 7 sources potentielles d’exposition aux risques psychosociaux (RPS) qui relèvent de l’organisation, des conditions de travail, des conditions de vie au travail, de son contenu, des relations interpersonnelles avec les collègues et la potentielle hiérarchie, de la dimension expressive et de la soutenabilité du travail. Nous avons demandé aux répondant·e·s d’évaluer un ensemble d’affirmations pour chacune de ces dimensions. Ceci nous a permis de mieux comprendre la réalité du travail dans le secteur et la manière dont les travailleur·euse·s la vivent, pour ensuite la mettre en relation avec les indicateurs RPS qui sont le nombre de symptômes par personne, la fréquence moyenne d’apparition de l’ensemble des symptômes et la fréquence moyenne d’apparition des symptômes cognitifs. Voici les résultats les plus importants pour chaque dimension.
- L’organisation du travail se rapporte à la manière dont les responsabilités et les missions sont définies et distribuées au sein d’une entreprise (SPF Emploi, 2017).
- Deux sous-dimensions ont été identifiées, le sentiment d’autonomie et le sentiment d’une collaboration efficace.
- L’appréciation de cette dimension est mitigée. Le sentiment d’autonomie est mieux évalué que l’impression d’une collaboration efficace.
- Certains items, comme les initiatives permises et la participation aux prises de décision, sont plutôt bien évalués.
- On fait l’hypothèse que l’autonomie dont jouissent les intermittente·s améliore l’évaluation de cette dimension.
- Le sentiment d’autonomie a un effet minime sur les trois indicateurs RPS.
- Le sentiment d’une collaboration efficace est considérablement corrélé avec les trois indicateurs RPS et participe particulièrement à la diminution de la fréquence moyenne d’apparition de l’ensemble des symptômes.
Cette dimension est bien évaluée et la perception d’une collaboration efficace permet la diminution des indicateurs RPS. Il s’agit d’une dimension importante mais non prioritaire.
- Le contenu du travail fait référence à la clarté de la définition du travail mais également aux tâches qui le composent.
- Son évaluation par les répondante·s est très négative. On note une charge administrative trop élevée, une inadéquation entre les compétences et les tâches et un niveau d’attention requis trop élevé.
- Le contenu du travail est fortement corrélé aux indicateurs et est la 2ème dimension la plus importante en termes de diminution des manifestations des RPS pour le secteur.
- Elle participe particulièrement fortement à la diminution de la fréquence d’apparition des symptômes cognitifs (ex : difficultés à se concentrer ou le fait de se sentir submergé par le travail).
Cette dimension est clé pour le secteur. Il s’agit d’une dimension importante pour le bien-être des travailleur·euse·s qui est, pour le moment, très mal évaluée.
- Cette dimension contient deux sous-dimensions, la pression temporelle qui correspond au sentiment de pression dans le travail, et l’articulation des temps sociaux qui correspond à l’articulation du temps de travail avec les temps personnels.
- De manière générale, cette dimension est très mal évaluée. L’articulation des temps sociaux est mieux évaluée que la pression temporelle - certainement dû au niveau d’autonomie dont bénéficie une grande partie de la population – mais les deux sous-dimensions restent mal évaluées.
- On note notamment que l’intensité du travail fluctue beaucoup, le rythme de travail est soutenu, les horaires peu prévisibles, les journées longues et que la déconnexion du travail est difficile.
- Cette dimension est la plus fortement corrélée aux trois indicateurs des manifestations des RPS. Les deux sous-dimensions permettent la diminution des trois indicateurs.
Il s’agit de la dimension la plus importante pour le bien-être des travailleureuse·s dans la mesure où c’est celle qui contribue le plus à la diminution des symptômes au sein de l’échantillon. Elle demande donc à être améliorée en priorité.
- Il s’agit d’une des dimensions les mieux évaluées du secteur. Globalement, les répondante·s sont assez satisfait·e·s des relations avec leurs collègues.
- Il s’agit d’une dimension modérément corrélée avec les trois indicateurs RPS. Elle participe à leur diminution mais ne fait pas partie des dimensions ayant l’effet le plus fort.
Etant donné qu’il s’agit d’une des dimensions les mieux appréciées, il est important de l’entretenir et de l’améliorer. Elle participe, aujourd’hui, grandement au bien-être des travailleureuse·s du secteur.
- 59 % des répondante·s estiment avoir une hiérarchie.
- Les relations ne sont pas particulièrement bien évaluées. Les travailleur·euse·s soulignent le manque de compétences et de ressources nécessaires pour que la hiérarchie puisse bien accomplir ses tâches. On fait l’hypothèse que le changement régulier d’équipe participe à rendre cette dimension complexe pour le secteur des arts du spectacle.
- Les répondante·s semblent se sentir reconnu·e·s par leur hiérarchie.
- La dimension est modérément corrélée aux indicateurs RPS.
Cette dimension mérite de l’attention étant donné sa mauvaise évaluation et son effet sur les indicateurs RPS. L’amélioration des ressources et compétences de la hiérarchie est à creuser.
- Il s’agit des conditions associées au lieu de travail (normes de sécurité et infrastructures).
- La satisfaction vis-vis de cette dimension est plutôt mitigée.
- La corrélation avec les indicateurs RPS est mitigée aussi. Son effet est faible.
On peut envisager d’améliorer les infrastructures, rendre possible l’isolement, mais il ne s’agit pas d’une dimension prioritaire.
- On peut dire que la dimension expressive renvoie au sens que les travailleureuse·s trouvent et donnent à leur occupation.
- Cette dimension est évaluée de manière mitigée et l’évaluation des différents items est dispersée.
- Certains items sont appréciés, comme les possibilités d’apprentissage, l’épanouissement personnel au travail, le sentiment d’un travail bien fait et le sentiment d’utilité.
- D’autres items ne sont pas appréciés, comme le sentiment de reconnaissance par la société et la cohérence entre les tâches et les priorités personnelles.
- On fait l’hypothèse que l’instabilité du travail et le niveau de salaire participent à ce manque de sentiment de reconnaissance.
- Le manque de cohérence avec les priorités personnelles peut venir du temps passé sur les tâches annexes telles que les tâches administratives.
- Il s’agit d’une des dimensions ayant l’effet le plus conséquent sur les indicateurs RPS.
Cette dimension est très importante pour le secteur. Elle n’est pas particulièrement mal évaluée, les travailleureuse·s y trouvent du sens, mais elle a un impact fort sur les indicateurs. Il faut donc l’entretenir et la développer de manière à réduire les RPS.
- La soutenabilité correspond en quelque sorte à la possibilité de s’inscrire durablement et sereinement dans le parcours professionnel. On se demande si la situation est tenable, et suffisamment confortable, sur le long terme, pour les travailleureuse·s.
- Cette dimension est mal évaluée. Ce qui met en avant une situation précaire pour beaucoup de répondante·s : salaire insuffisant, situation professionnelle inconfortable, pas d’assurance vis-à-vis de la prolongation des contrats, faible confiance en l’avenir, pas de filet de sécurité, etc.
- Elle participe fortement à la réduction des indicateurs RPS, particulièrement le nombre et la fréquence moyenne d’apparition des symptômes dans leur ensemble.
- Cette dimension est également intéressante en termes de différences entre les intermittente·s et les CDI.
- Le travail est plus soutenable pour les CDI.
- Les CDI sont plus satisfaite·s de leur salaire, se projettent mieux professionnellement, arrivent à gérer leurs engagements, se sentent plus reconnu·e·s par la société, etc.
- En revanche, les intermittente·s, disposent davantage d’un filet de sécurité, ont plus confiance dans l’évolution positive de leur carrière mais craignent la non-reconduction de leurs contrats.
- L’instabilité faisant plus partie de la réalité des intermittente·s, on fait l’hypothèse que ces dernier·ère·s s’y préparent plus, et ont donc un filet de sécurité parce qu’ils et elles en ont besoin.
Cette dimension nécessite une attention particulière. Son amélioration aura un effet considérable sur le bien-être des travailleureuse·s du secteur.
Pour résumer, les dimensions auxquelles il faut donner de l’attention en priorité sont :
- Les conditions temporelles du travail ;
- Le contenu du travail ;
- La soutenabilité du travail ;
- Le harcèlement sous toutes ses formes.
Les dimensions suivantes méritent également de l’attention mais de manière moins urgente :
- Les relations avec les collègues ;
- Les relations avec la hiérarchie ;
- La dimension expressive du travail.